Discours de M. le Président de la République sur la Défense et la Sécurité Nationale

Porte de Versailles - mardi 17 juin 2008

Monsieur le Premier ministre, Madame et Messieurs les Ministres, Monsieur le Président du Sénat, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, Mesdames et Messieurs,

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Aujourd’hui, je suis venu vous parler de la France et de la sécurité des Français. Il n’y a pas de liberté, il n’y a pas d’égalité, il n’y a pas de fraternité sans sécurité.

Je veux parler de sécurité aux Français, en leur tenant un discours de vérité.

Je veux parler de la sécurité à ceux qui s’y consacrent sans compter, en particulier aux militaires et aux forces de sécurité intérieure et de sécurité civile. On doit pouvoir leur en parler sans qu’ils redoutent une remise en cause de leur engagement.

Je veux m’adresser également à nos partenaires en Europe, je veux m’adresser à nos Alliés, je veux leur dire comment la France entend participer à notre sécurité commune. Au fond, je souhaite parler à toutes les nations, et leur dire quel sera désormais l’engagement de la France pour le maintien de la paix.

A tous, je veux adresser un message simple : la France veut la paix, la France veut la sécurité. Pour elle-même et pour le monde.

Je veux vous dire, et dire à tous les Français, que la politique de défense et de sécurité de la France est à la croisée des chemins.

Nous devons aborder avec lucidité, avec sang-froid, les enjeux de sécurité de ce début de XXIème siècle.

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Notre première ambition, c’est que le monde qui vient soit un monde meilleur.

Un monde meilleur c’est un monde où il y a de la liberté, de la démocratie et le respect des droits de l’homme.

Un monde où la responsabilité l’emporte sur l’égoïsme. Un monde où le dialogue et l’ouverture aux autres auraient vaincu le radicalisme et l’enfermement dans des idéologies de haine et d’exclusion.

Un monde qui trouverait, par la coopération et le dialogue, des solutions viables aux défis globaux du changement climatique, des grandes pandémies, de l’accès à l’eau et aujourd’hui de l’accès aux matières premières.

Un monde où chaque homme et chaque femme pourrait accéder dans son pays à une vie décente, à l’éducation et à la santé.

Une communauté internationale, enfin, qui se rassemblerait autour d’institutions multilatérales solides, représentatives des réalités d’aujourd’hui, à commencer par le Conseil de Sécurité et le G8 qui doivent être élargis à de nouveaux membres.

J’en ai la conviction, c’est la vocation de la France de porter cet idéal de paix et de liberté. C’est la vocation de l’Europe de l’incarner dans le monde actuel.

Car l’Europe, quels que soient les aléas institutionnels, a surmonté ses divisions, ses affrontements historiques, pour créer, par une union toujours plus étroite, un modèle unique de coopération entre les Nations. Notre Europe démontre au monde entier qu’entre des peuples qui se sont tant combattus, on peut construire un destin commun de paix et de prospérité. Ce n’est pas facile mais c’est quand même plus facile que ce que le continent, notre continent a connu avant l’Union européenne et, franchement, ceux qui vivaient avant l’Union européenne seraient bien amusés de nous voir si préoccupés par les débats institutionnels qui sont les nôtres, eux qui ont eu à vivre des affrontements meurtriers et moyenâgeux.

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Chaque époque historique a un esprit. L’esprit du XXIème siècle, c’est la mondialisation. Prendre notre place dans ce monde nouveau, c’est notre premier objectif.

Nous avons tout pour y figurer au premier rang. Le dynamisme de notre population. Notre vitalité démographique. La puissance de notre industrie. L’excellence de nos technologies. La qualité de nos infrastructures. La richesse de notre patrimoine. Les enseignements de notre histoire.

Nous avons le devoir d’y figurer au premier rang. Nous sommes membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU, nous portons une responsabilité particulière pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Être membre permanent, ce n’est ni un statut, ni un privilège. C’est une mission au service du monde. J’ajoute que les pays qui souhaitent exercer ces responsabilités doivent aussi comme nous être prêts à en payer le prix du sang. J’entends que la France soit capable d’assumer cette responsabilité et de s’engager pour mettre en œuvre les principes de la Charte et la responsabilité de protéger. C’est ce qu’elle a fait encore cette année au Tchad, en prenant l’initiative, cher Bernard KOUCHNER, du déploiement de l’EUFOR. Et si la France n’avait pas été là, qui aurait fait à notre place ? C’est ce que nous faisons en Afghanistan avec le renforcement de notre contingent, dans le cadre des mandats de l’ONU.

Mais c’est l’incertitude qui est la marque du monde actuel. L’incertitude est fille de la mondialisation. L’incertitude est donc le fondement d’une nouvelle stratégie pour la France. Cette stratégie reposera sur la capacité d’anticipation et l’autonomie de décision. D’ailleurs, le Premier ministre le sait parfaitement sans capacité d’anticipation quelle est l’autonomie de décision ? Nulle.

La mondialisation a permis de formidables progrès : de plus en plus de peuples connaissent la démocratie, des dizaines de millions d’êtres humains sont sortis du dénuement, l’information et les connaissances se diffusent.

Mais la mondialisation n’a éliminé ni les dangers, ni la guerre. Le monde est confronté au terrorisme de masse, aux tensions qui naissent de la course aux matières premières, à des risques naturels et technologiques croissants.

L’Asie a connu un développement économique sans précédent. L’Asie est devenue un nouveau centre de gravité stratégique. Des facteurs de risque y persistent. L’Europe a un intérêt fondamental à la sécurité de la principale zone de croissance du monde.

Aux portes de l’Europe, dans la zone qui va de l’ouest africain jusqu’à l’Asie, en passant par la Méditerranée et la région du Golfe, les facteurs d’instabilité et de violence sont nombreux : revendications identitaires, radicalisations, conflits ouverts ou latents, terrorisme et même prolifération.

En Afrique, notre plus proche voisin, des tensions perdurent, prospérant sur des carences de la gouvernance, sur la pauvreté, le sous-développement, les trafics. Là aussi, des groupes terroristes s’implantent et instrumentalisent des situations pour favoriser quoi ? Leurs objectifs criminels.

En Europe, nos frontières terrestres et maritimes ne sont plus sûres. Et la Russie est revenue à une politique d’affirmation de sa puissance. Ce n’est insulter personne que de le dire.

Dans ce monde qui change, où émergent de nouvelles puissances économiques et militaires, le poids démographique et économique de l’Occident décroît mécaniquement. Nous conservons des atouts considérables, grâce à notre dynamisme et à notre technologie.

Depuis 15 ans, la France n’est plus menacée d’invasion. Les menaces ont changé de nature, elles sont diverses, mouvantes. Elles nous semblent lointaines, mais, ne nous y trompons pas, notre territoire national comme le territoire européen peut être frappé demain. C’est à ces menaces que la France, le peuple français, doivent être préparés.

Nous ne pouvons exclure la réapparition d’une menace majeure, de quelque nature qu’elle soit, qui mettrait en péril la survie même de la Nation.

Alors aujourd’hui, la menace immédiate est celle d’une attaque terroriste. Grâce à l’efficacité de l’ensemble de nos forces de sécurité, la France n’a pas été atteinte au cours de ces dernières années. Mais la menace est là, réelle, et nous savons que cette menace peut prendre demain une forme nouvelle, encore plus grave, avec des moyens radiologiques, chimiques et biologiques.

La prolifération continue de se développer. Un nombre croissant de pays vont disposer de missiles balistiques dont il faut bien dire que la portée s’allonge, jusqu’à atteindre plusieurs milliers de kilomètres, jusqu’à pouvoir frapper l’Europe.

Le risque d’attaques informatiques qui pourraient paralyser la Nation, n’est déjà plus une simple hypothèse : la France et plusieurs pays européens en ont été des victimes récentes.

Enfin, les systèmes spatiaux eux-mêmes ne sont plus invulnérables. Or ils sont essentiels à nos sociétés développées.

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-  Télécharger le discours complet (format pdf, sur le site elysee.fr)

17-06-2008